Mémoire | Projet de recherche
Collecte des noms des victimes polonaises de la Shoah
Sur les quelque 6 millions de Juifs assassinés par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, la moitié l'ont été en Pologne. C'est aussi dans ce pays qu'il reste le plus de victimes à identifier : 800 000 personnes à qui il s'agit de redonner un nom et une histoire, pour sauvegarder et entretenir leur mémoire. C'est l'une des missions de l'institut international Yad Vashem à laquelle la Fondation apporte son soutien.
Sur les 6 millions de Juifs assassinés par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, la moitié l'ont été en Pologne. La communauté juive polonaise a ainsi été décimée à hauteur de 90%, soit un des pourcentages de victimes juives les plus élevés parmi les pays européens. C'est aussi dans ce pays qu'il reste le plus de victimes à identifier : il manque en effet près d'un million de noms dans la base de données de Yad Vashem, dont 800 000 Juifs de Pologne.
Malgré les obstacles de ces dernières années, dues aux restrictions liées à la crise sanitaire ainsi qu'aux relations fluctuantes entre la Pologne et Israël, Yad Vashem parvient à collecter chaque année des milliers de noms, sans atteindre toutefois le rythme d'enrichissement prévu de 60 000 nouveaux noms par an.
En 2022, les équipes de Yad Vashem ont effectué un travail de numérisation et une cartographie des collections dans plusieurs archives d’État de l’université de Kielce, celles de Lodz, et à Varsovie : dans la bibliothèque Jagellonian de l’Université, dans le département d'Histoire du mouvement populaire en Pologne ainsi que dans les archives centrales de la conservation moderne. Ce sont ainsi plus de 500 000 pages de documentation qui ont été rassemblées et copiées, en partenariat avec l'USHMM.
Hilda Shlick (née Glasberg) était persuadée que toute sa famille avait péri dans la Shoah. 65 ans plus tard, ses petits-enfants consultent une Feuille de témoignage sur le site de Yad Vashem et découvrent qu’une partie de sa famille avait survécu et vivait au Canada. En 2008, grâce à Yad Vashem, Hilda rencontre son frère Simon pour la première fois depuis la guerre. © Yad Vashem
Une méthode unique
Au fil des années, Yad Vashem a conçu une méthode basée sur des outils informatiques performants qui permettent d'identifier, parmi les millions d'archives disponibles, les documents pertinents pour la recherche de noms de victimes. Les informations, récupérées par le personnel de Yad Vashem capable de lire et comprendre les archives polonaises, sont vérifiées puis éditées et enregistrées dans la base de données en ligne, accessible au public en hébreu, anglais, russe, espagnol et français. L'expérience accumulée lors des précédents projets de recherche portant sur les noms des victimes hongroises et celles de l'ex-URSS bénéficie ainsi à ce programme.
En 2022, Yad Vashem a ainsi pu rajouter près de 26 000 nouveaux noms dans sa base de données, perpétuant ainsi les noms et les héritages de victimes, dont le souvenir aurait pu être à jamais perdu.
Ce travail permet de reconstituer le destin de nombreuses communautés décimées par la Shoah, comme celui de la ville de Skarzysko-Kamienna. La population juive de cette ville était de 2200 en 1939, estimation établie notamment par les registres militaires. Entre 1941-1942, l'occupant nazi regroupe cette population alors estimée à 3000 personnes dans un ghetto qui est liquidé en octobre 1942 vers le camp d'extermination de Treblinka. À l'emplacement du ghetto est construit un camp où passeront 25 à 30 000 Juifs dont les 3/4 meurent sur place, de faim, de maladie, ou assassinés par les nazis. À l'hiver 1945-46, 10 rescapés reviennent dans la ville récupérer leurs biens, 5 seront assassinés par des criminels locaux, quelques-uns partent et seules 2 personnes finiront leurs jours sur place.
Le Livre des Noms © Yad Vashem
La Fondation pour la Mémoire de la Shoah soutient l'institut Yad Vashem depuis de nombreuses années dans cette collecte des noms des victimes de la Shoah. Ce soutien s'est d'abord porté entre 2006 et 2015 sur la zone de la Grande Hongrie, puis à partir de 2010, sur la Pologne. Ce travail est prévu pour durer jusqu'en 2027.