Mémoire | Publication
Cimetière fantôme : Thessalonique - Martin Barzilai
Le photographe Martin Barzilai, petit-fils d’un Juif salonicien qui a fui en 1940 – à temps car environ 54 000 juifs de Thessalonique furent déportés et exterminés, soit 96 % de la population juive de la ville –, s’est rendu à plusieurs reprises à Thessalonique depuis 2018, à la recherche des fragments de tombes du plus grand cimetière juif d'Europe, disséminés dans la ville, à la suite de son expropriation par les Nazis en 1942. De cette enquête, il est revenu avec de nombreuses photographies, un journal de bord et des entretiens avec des personnes concernées par cette "mémoire fantôme". Deux historiennes interviennent en contrepoint de son propos.
À la suite de la Reconquista, Isabelle la Catholique expulse les juifs d’Espagne en 1492. Ils sont accueillis dans l’Empire ottoman, en particulier dans les Balkans et à Salonique. Ils représentent, au XVIIIe siècle, la moitié de la population de la ville et, jusque dans les années 1920, sont majoritaires en rapport aux communautés grecque et turque. Dans ce contexte, les juifs de Salonique ont pu conserver leur langue : le judéo-espagnol ou ladino. Le cimetière juif de Thessalonique est alors le plus important d’Europe. On estime qu’il contenait environ 300 000 tombes. Une grande partie des inscriptions en caractères hébraïques sur ces stèles, en ladino et en hébreu, sont difficilement déchiffrables de nos jours. En 1942, alors qu’ils contrôlent la ville depuis un an, les Nazis exproprient le cimetière en échange de la libération de 6 000 travailleurs prisonniers juifs, contraints aux travaux forcés. Les pierres tombales seront utilisées comme matériel de construction, par les Allemands puis par les Grecs, notamment pour l’enceinte de la nouvelle gare ferroviaire et dans un grand nombre d’autres chantiers. Aujourd’hui, on les retrouve à travers toute la ville et au-delà. Environ 54 000 juifs de Thessalonique furent déportés et exterminés, soit 96 % de la population juive de la ville. Le photographe Martin Barzilai, lui-même petit-fils d’un juif salonicien qui a fui Thessalonique en 1940, s’est rendu à plusieurs reprises à Thessalonique depuis 2018, à la recherche ces fragments de tombes disséminés dans la ville, de ce qui a été rendu invisible, ces traces qui ont résisté au temps. De cette enquête il est revenu avec de nombreuses photographies - le livre en présente 64 en quadri - , un journal de bord et des entretiens avec des personnes concernées par cette mémoire fantôme. Deux historiennes interviennent en contrepoint pour éclairer cette histoire : Katerina Králová et Annette Becker. |
Ce livre, publié chez Créaphis édition, a reçu le soutien de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah.
L'ouvrage sera présenté en avant-première au 26e Rencontres de l'Histoire de Blois, sur le thème des "Vivants et les morts".
►Parution : jeudi 19 octobre 2023